Tuesday, January 31, 2006

Charogne

Bien fait. Je paie aujourd'hui pour ma négligence.
J'admets avec une grimace que je dois mieux garder l'inventaire de la nourriture qu'il y a chez moi.

Depuis hier, un curieuse odeur flotte dans l'appartement. Pas la fumée de cigarette, pas la litière du chat. Depuis hier, je me dis que je vais faire enquête. Et en entrant tout à l'heure, j'ai été littéralement assaillie par une odeur insupportable. J'ai honte de le dire, à force de chercher, j'ai pu retracer la source des effluves de charogne qui empestent l'appartement: j'ai oublié le poulet dans le tambour. Pestilence! Damnation! Horreur! La pauvre carcasse que je devais transformer en somptueux bouillon vient de passer beaucoup trop de temps sur la sécheuse, dans la pièce attenante à la cuisine. H me l'a fait remarquer, ce weekend. "Faudrait faire quelque chose avec le poulet" Et ce n'est pas tombé dans l'oreille d'une sourde. Mais j'ai...oublié. Pas fort! Cette pièce où il n'y a pas de chauffage est merveilleuse l'hiver: dépendant de la température qu'il fait dehors, c'est un réfrigérateur ou un congélateur. Excellent pour y conserver les biscuits de Noël fait à l'avance, les carrés au chocolat qu'on ne veut pas manger tout le même soir où...les poulets en attente de dépeçage. Avec le temps doux des derniers jours, ça aurait dû rester le tambour. Et pourquoi, d'abord, qu'en janvier, on goûte à deux degrés et à la pluie? Pas normal, pour ce coin de pays. Voilà, c'est le réchauffement de la planète. Ça doit être ça.

Et là, avec ma journée dans le corps, j'ai payé pour ma négligence. Je crois maintenant au karma. Non seulement est-ce qu'il aurait été suffisant que je doive ôter le couvercle de mon creuset pour jeter les restes odieux au fumet pestilent, mais il a fallu que je ne vérifie pas l'état de putréfaction de la chose. J'ai donc pensé bien faire en faisant d'une pierre deux coups. Je me suis dit qu'en vidant la poubelle de la cuisine (qui est d'ailleurs beaucoup trop grosse et qui est parfois la source d'odeurs désagréables...) je pourrais de facto faître disparaître le poulet en putréfaction. Mais voilà, les restes étaient en train de se liquéfier... J'ai donc versé par inadvertance une bonne tasse de gras et de bouillon puants sur le plancher de la cuisine. Vite! Aux toilettes jeter le reste! Il faut filtrer le mélange offensif! Il faut retenir son souffle! Devenir verte! En échapper sur ses manches de chandail pour que ça sente encore plus! Oui! Oui!

Et là, par -15 degrés, les fenêtres de l'appartement sont grandes ouvertes. Boo se demande ce qui se passe. Et mon nouveau gourami qui nageait allègrement hier encore est mort.

Quelle journée! Ça a commencé par des problèmes informatiques au travail qui m'ont bouffé la moitié de mon avant-midi. C'est à se demander pourquoi je m'occupe de l'informatique au travail. Je n'y connais rien. J'en sais un peu plus que la base. Mais pas de là à gérer la chose! J'aurais aimé pouvoir trouver une phrase, une seule, pour calmer les collègues. Mais l'irritabilité était au rendez-vous. Une chance, l'après-midi s'est bien passé, si ce n'est que du mal de tête et du dos en feu. Je ne suis pas retournée au bureau après mes quatre heures à la bibliothèque.

Qu'à cela ne tienne! Je ne laisserai pas des riens comme ça me faire une mauvaise journée, parce que ça pourrait être pire. Il faut remettre les choses en perspective. La journée n'est pas finie, par contre...il pourrait arriver d'autre chose! Nnnon! Je refuse de me laisser abattre! Il y a des gens qui vivent sans bras, sans jambes, il y a des gens qui ont perdu des êtres qu'il aiment aujourd'hui. Il y a la guerre quelque part dans le monde. Des orphelins, des veuves, des gens qui sont perdus, sans le sou, dans un pays étranger peu hospitalier. Il y a un enfant qui vient de mourir. Il y a une maman qui souffre, quelque part. Voilà. Remise en perspective efficace.

Je vais tricoter, tiens. Ne reste plus qu'à ne pas échapper de mailles...En fin de semaine, j'ai constaté que laisser des tricots en plan dans un sac de papier invitait le désastre. Surtout les griffes de Boo. J'ai donc vidé le bac Rubbermaid vert qui n'était qu'à moitié rempli dans le bureau et je me suis fait un coin pour mes réserves de laine. J'ai de beaux projets dans mon bac vert. Une couverture de bébé pour la petite chose qui grandit dans le ventre d'I. Un foulard pour D. Un foulard crocheté pour moi. Un début de courtepointe. C'est fou ce que le tricot occupe une grande place, maintenant. C'est bon contre le stress. Sauf quand on apprend à tricoter autre chose que des mailles à l'endroit et qu'on s'attaque au jersey pour la première fois. Je pensais bien perdre la tête dimanche, les mailles étaient tellement serrées! Mais j'ai persévéré, pour les cent mailles du rang, et je me suis répété mon petit mantra. C'est juste un tricot! C'est juste un tricot! Il faut le tricoter avec affection et patience, insuffler aux mailles toute la douceur dont je suis capable, c'est pour un petit bout d'amour que je vais aimer avec tout mon coeur!

J'expérimente donc une alternance jersey/point mousse avec le foulard à D et la couverture du futur petit pou (ou petite puce). Et je suis très satisfaite des résultats! Je suis si fière d'enfin conquérir ma peur du nouveau, peur de me tromper, peur de ne pas réussir. Ça fait du bien.

Saturday, January 28, 2006

Le temps d'écrire.


Salutations sincères, lecteurs et lecteuses invisibles.

Quelle constance! Quelle assiduité! Que de réflexions!

Aucune rigidité pour ce processus qui, même en investissant $15,00 pour un petit cahier tout beau, aspect-soie-qui-ferme-avec-un-aimant, continue de m'échapper. Dois-je prendre rendez-vous avec moi-même pour venir ici ou ouvrir mon cahier à la fermeture hyper-sécuritaire? Dois-je me botter le postérieur pour tirer de mon cerveau des phrases qui me font du bien? Je sais que je dois écrire. J'ai des idées à la tonne, mais je ne les consigne nulle part. Elle se perdent dans les dédales de mon gruyère de matière grise. Mais comment? Comment?

Je sais que je veux écrire. Que je sois n'importe où, il m'arrive d'être assailie par une suite de mots qui ne veulent rien dire d'eux-même mais qui, allongés, épicés un peu, même, pourraient devenir des exutoires tout à fait bénéfiques. Je devrais suivre mes propres conseils. C'est ça. Je devrais toujours avoir sous la main (où pas trop loin) un cahier pour écrire ces mots. Juste pour leur donner une forme de permanence, juste pour être capable de les cueillir et de jouer avec un peu. Pourquoi? Pouuurquoi!

Je sais que je sais écrire. Je le prouve en ce moment même, lecteurs et lecteuses. Je sais à peu près où se trouvent les lettres sur le clavier avec plein d'autre touches dont je ne me sers pas. Je regarde le clavier quand j'écris, mais je vais conserver cette question pour une autre entrée. Oui, j'ai fait taptouche au collégial. Oui, j'ai suivi des cours de dactylo au secondaire. (dac-ty-lo: n.f. machine à écrire qui précède, dans l'histoire de la technologie de l'écriture, le clavier d'ordinateur, lui-même précédé du système de traitement de texte intégré). Mais tout cela étant dit, et ayant maintenant établi avec certitude le fait que je sais écrire (physiquement, à tout le moins), pourquoi ne le fais-je pas? Par paresse? Mmmm. Hypothèse valide. Mais je le fais, là, maintenant! Je viens même de laisser un message à D pour lui demander qu'il m'appelle aveant de se pointer chez moi, parce que je suis encore en pyjamas à onze heures dix et que je suis en train d'écrire! Re-mmm. Curieux. Qu'est-ce qu'il me faut?

J'imagine que l'inspiration se fait plus rare quand je passe huit heures par jour le cerveau encombré de questions et de réflexions reliées à mon travail. Bon. Vingt-quatre moins huit font seize. Un autre huit heures de dodo. (Note: Développer une méthode pour écrire en dormant: possibilité à l'étude. Pas la première à avoir cette idée, en suis certaine.) Il reste donc huit heures. Une heure à commencer la journée le matin, une heure de bus au total dans la journée, une heure à faire le souper et le manger, une heure à regarder les nouvelles, trois heures à regarder quelque chose sur DVD, il reste...une heure.

Voilà. J'ai trouvé le temps d'écrire.